Commune du. Canton de COZES
(à 8 kilomètres au Sud-Ouest de Cozes et
à 34 kilomètres de Saintes)
L'église de Talmont est le monument religieux le plus
visité, sinon le plus connu de la Saintonge.
Sa valeur
archéologique et sa renommée historique ne sont
pas étrangère à sa
célébrité, mais c'est surtout la
situation unique et infiniment pittoresque qui lui a valu sa
réputation.

Cet antique
édifice roman se dresse, en effet, à
l'extrême bord d'une falaise escarpée qui domine
le bras de mer qu'est la Gironde vers son embouchure. Il est si
près des flots que pendant les tempêtes d'hiver
ses vieilles murailles sont continuellement fouettées par
les embruns. La mer, a cet endroit en lutte constante avec la
côte, ronge sans répit ses bords et c'est par une
sorte de miracle, aidé il faut le reconnaître par
le travail opiniâtre des hommes, que cette église
ne s'est pas encore entièrement abîmée
dans les eaux.
Aujourd'hui la
façade Ouest s'élève au-dessus d'un
mur de soutènement dont le pied est baigné par
l'océan et que des travaux incessants de
maçonnerie maintiennent seuls en bon état.
Un petit
cimetière agreste environne l'église sur deux
cotés et ajoute encore à l'originalité
du curieux tableau formé par la mer les rochers et le vieux
monument.
Talmont
était à l'origine le petit port (Note 1 ) d'une agglomération
romaine située a un ou deux kilomètres
à l'intérieur des terres (Moulin du FA).
Plus tard,
c'est dans ce port que s'embarquaient, pour traverser le golf de
Gascogne, les pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle.(Note 2).

Vers
l'époque carolingienne un prêtre y construisit une
chapelle dédiée à Sainte Radegonde.
Cette chapelle fut bientôt cédée ( en
1094) à l'abbaye de Saint-Jean-d'Angély, mais
subsista jusqu'au XVe siècle à
côté de l'église principale.
A la disparition
le vocable passa ou resta à l'église actuelle.
« A quel autre saint pourrait être
consacré cet édifice qui domine la mer et est
perpétuellement menacé par elle ? » dit
Ch. Dangibeaud. D'après les litanies. Sainte Radegonde est,
en effet :
« L'ancre très assurée de
ceux qui sont en péril de mer ».
L'édifice actuel est une construction du XIIe
siècle. Dangibaud précise qu'il a
été édifié entre 1140 et
1170 par les mêmes ouvriers qui bâtirent
Rétaud, Rioux, Pont-l'Abbé et Arces.

L'abside
d'ailleurs n'est pas sans analogie avec celles de Rétaud et
de Rioux. Même disposition générale,
même remarquable arcature au premier étage et
surtout identiques colonnes contreforts a retraits successifs. Mais la
décoration est beaucoup moins riche que celle des deux
merveilles de la Saintonge. Elle est aussi beaucoup plus
détériorée.

Talmont a
été primitivement édifié en
forme de croix latine parfaite. Nef à deux ou trois travées,
transept avec absidioles, choeur et abside demi-circulaire,
mais dès le XVe siècle la mer sapant
et détruisant la falaise avait fait disparaître
une grande partie de la nef côté Ouest, ce qui
explique la forme et l'emplacement de la façade occidentale
actuelle qui ne clôt plus qu'une nef à une seule
travée.
Au-dessous de
celle-ci il a été découvert au
siècle dernier une vaste crypte qui s'étend tous
le terre-plein placé en avant de la façade. Avec
ses 9 mètres de longueur, cette crypte, qui a la forme d'une
proue de vaisseau, ne se trouve à marée haute
séparée de la mer que par une muraille de 1 m. 50
d'épaisseur. Entre les deux étages
s'étendait un plancher en assez mauvais état.
L'espace inférieur servait d'ossuaire. Vingt
mètres cubes d'ossements, en ont été
retirés et quelques monnaies carolingiennes dont certaines
en or y ont été recueillies.
Le transept
particulièrement large, couvert comme la nef d'une
voûte de pierre en forme de berceau brisé, a son
carré encadré par quatre énormes
massifs formés de colonnes accolées dont les
bases surélevées reposent sur un tambour ou
banquette circulaire. Quatre arcs en tiers-point a double ressaut supportent une
coupole sur pendentifs dont la base est ornée d'un fin
cordon sculpté.

De beaux
chapiteaux romans bien travaillés terminent les colonnes.


Chaque
bras du transept est complété par une absidiole
voûtée en cul-de-four. Celle de droite sert de
sacristie. Devant celle de gauche, qui est occupée par une
chapelle,

est
suspendu en ex-voto un magnifique trois-mâts.

Le choeur de vastes
proportions est nu. L'abside légèrement plus
étroite que le choeur, aussi
voûtée en cul-de-four, a son demi-cercle
orné de cinq fenêtres larges et hautes (deux
aveugles). Leurs cintres décorés s'appuient sur
d'élégants chapiteaux surmontant des colonnes
posées sur des crédences a hauteur d'un cordon
faisant le tour de l'abside.

Ce cordon
se continue sur les murs du choeur, tandis qu'un deuxième,
également ouvragé, souligne la voûte.
Les fenêtres sont ornées de colonnettes
à chapiteaux.
Talmont a deux
façades, une à l'occident, une au Nord. La
première ogivale du XVe siècle, qui
regarde le Médoc, est un simple mur à pignon
percé
d'une porte gothique dont le cintre supérieur en accolade se
hérisse de crochets. Deux puissants contreforts
l'étayent aux angles.
L'autre, la
principale, qui occupe toute l'élévation Nord du
bras gauche du transept, est rehaussée d'une belle
décoration romane.

Au
rez-de-chaussée un portail en plein-cintre à
trois voussures richement ornées s'accompagne de deux baies
aveugles dont les chapiteaux très fouillés sont
réunis par un bandeau sculpté.
A l'étage se développe une
arcature à sept cintres portés par de fines
colonnettes avec au-dessus encore une corniche à modifions
et couronnant le tout un pignon obtus percé d'un large
oculus.

La
scène, qui se déroule sur l'arc de la porte
aveugle de gauche a été fort
commentée. Certains y voient un saint Georges ou un
chevalier armé combattant un dragon en présence
de femmes. Pour d'autres c'est l'illustration d'une vieille
légende répandue autrefois dans le pays. Des
hommes pieux, aidés d'un ange, débarrassent la
contrée d'un démon redoutable en le conduisant
par un simple lien, se précipiter dans un abîme.
Malheureusement toutes les sculptures ont été
très détériorées par l'air
salin et les intempéries et beaucoup sont informes.
A
l'intérieur de l'église, près d'une
niche à droite du transept, étaient
disposés quelques fûts de colonnes de
différents ordres dont pendant longtemps l'origine n'avait
pu être déterminée. Il s'agissait de
vestiges trouvés au Moulin du FA, importante station romaine
à quelques kilomètres à l'Est de
Talmont, mise à jour récemment (Note 3).
Dans la
sacristie sont conservés quelques sujets
intéressants : des chandeliers Louis XIII, des croix de
procession, deux encensoirs fort anciens, un devant d'autel
brodé particulièrement soigné,
donné dit-on par Marie-Antoinette. Un beau Christ en bois
(classé) orne un des piliers du choeur.
L'église de Talmont faisait autrefois partie du
système fortifié de cette petite place d'armes
longtemps occupée par les Anglais. C'est une des
dernières localités qu'ils
abandonnèrent dans la région. Durant des
siècles le clocher qui devait s'élever au-dessus
du carré du transept a servi de tour de guet avant de
disparaître au cours d'un siège ou
peut-être au moment des guerres de Religion.
A l'emplacement de
cet ancien clocher une courte construction moderne,
édifiée au commencement du présent
siècle, a quelque peu modifié l'ancienne
silhouette de cet édifice.
Avec son vieux
cimetière, l'église de Talmont a
été classée Monument Historique le 31
janvier 1934.
Fin du texte de Charles
CONNOUË_________________________________
Les églises de la SAINTONGE
(épuisé)
___________________________________Éditions
DELAVAUD à SAINTES avec leur aimable permission
VOIR L'ALBUM JQ
Note 1:
Suite aux fouilles qui ont succédé à
la prospection aérienne menée par M J.
Dassié sur le site du FA, (voir
le lien plus bas) il s'agit en
réalité d'un port très
conséquent. La ville offre des vestiges d'une
cité de taille importante avec
des entrepôts, des thermes et
un amphithéâtre qui sera prochainement
fouillé. Une visite au site du "moulin du FA" à
BARZAN s'impose si le sujet vous intéresse.(Voir des liens plus loin)
Note 2 : Cet
itinéraire semble contesté aujourd'hui,
il s'agissait d'un itinéraire assez secondaire.
Note 3 : Ces
vestiges ont réintégré le
site du FA.
________________________________________________________________________________
"Faisons
parler quelques sculptures ou du moins essayons...
Les mots en gras se réfèrent à mon glossaire sur ce site

Des anges encadrent l'Agneau Pascal qui en fait n'en est pas un puisqu'il porte une sorte de pierre et non sa croix
En Saintonge il n'y a pas de croix !
Une chaîne humaine qui tire un quadrupède _ symbole opposé à la spiritualité _
Au dessous une chaîne constituée d'anneaux se terminant en fleur de lys _ symbole de pureté et chasteté _
et au-dessous une chaîne humaine d'acrobates _ l'acrobate est celui qui marche vers le ciel _

Pour délimiter le sanctuaire des fleurs de lys formant non pas un entrelacs, ni des rinceaux,
mais des "X", tout un programme pour les officiants qui doivent être purs pour que leurs prières soient écoutées...
Côté nef un volatile _ symbole de très haute spiritualité _ enseigne à l'oreille d'un monstre humanoïde

Dans le choeur à droite dans des collerettes à motifs de dents de scie des pseudo-fleurs de lys orientées vers le sol.
Entre deux visages insérés dans des collerettes à motif de ruban perlé _ symbole de la règle _ une magnifique
fleur de lys orientée vers le sol mais enfermée dans un coeur.
( A Aulnay ainsi que d'autres lieux des fleurs de lys sont dans des filets ou en cage)

Dans le principal de la corbeille : une belle femme, un guerrier casqué portant un bouclier et un monstre crachant des flammes.
C'est un clin d'oeil à St-Georges qui a vaincu le dragon et montre l'exemple aux clercs.
Pour la femme trois hypothèses:
C'est elle l'ennemi ( thèse répandue à l'époque dans le milieux clérical ; voir l'église de LE DOUHET) en symétrie du dragon
C'est la fille du roi, promise au dragon selon la légende.
C'est l'Église qu'il faut protéger
A propos
de Saint Georges
et du chapiteau qui lui est attribué:
- La
légende de Saint Georges se serait formée au
XIIe siècles et aurait été
fixée par Jacques de Voragine vers 1266 . On y apprend que
le saint est le général des chrétiens
pour avoir entraîné les
croisés à la victoire lors de la bataille
d'Antioche qui eu lieu en 1098. La croix rouge sur fond blanc
était l'emblème des croisés. Cet
emblème n'est mentionné comme croix de Saint
Georges qu'en 1277 (sous Edward I) et St Georges n'est
devenu le saint patron de l'Angleterre que sous Edward
III.
- A
l'époque de la construction de l'église de
Talmont nous ne sommes que dans la
deuxième moitié du XIIe
siècle _1150 à 1200_ pour cette partie
de l'édifice. Donc avant la " légende
dorée" de Voragine. Saint Georges est
déjà très probablement le saint patron
des croisés et le général des
chrétiens qui par sa foi sauve ceux-ci. Il est donc normal
de le trouver en chevalier avec armure épée
ou lance et un casque sans cheval en protecteur des
croyants. Cette représentation est de la même
veine que les représentations du combat entre les vices et
les vertus qui sont également revêtus des armes
de la foi...La jeune fille qu'il protège serait donc
l'assemblée des croyants c'est à dire
l'Église ?
- La
légende de Saint Georges si elle est en gestation
et aurait été fixée par Voragine
pourrait offrir une autre version du chapiteau de la
décollation du porche puisque Saint Georges aurait subit de
nombreux supplices avant d'être
décapité.
- Dans ce cas la
femme dans l'arcade ( et peut-être ci-dessus) serait la fille du roi (ou la ville de
Sélène) promise au dragon.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_de_Lydda
Le texte de Jacques de Voragine sur Saint Georges:
http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/voragine/tome01/060.htm:

Dans cette arcade le sculpteur raconte la légende de Ste Radegonde
Voici la légende du dragon
vaincu
par Sainte Radegonde
patronne des poitevins.
Légende du XIIIe siècle:
Dans les souterrains de Poitiers vivait un dragon terrifiant
appelé "Grand'Goule". Les personnes qui le rencontraient
étaient immédiatement
dévorées. Aussi, les religieuses de l'abbaye
Sainte-Croix supplièrent sainte Radegonde d'intervenir. La
sainte, pleine de courage, alla affronter la bête, munie de
la relique de la Croix, offerte par l'empereur de Byzance. A la vue de
cette pieuse relique, la bête fut terrassée.
Au Moyen Âge, les effigies de la "Grand'Goule"
étaient promenées de par les rues de la ville
lors des "rogations", processions religieuses. Les Poitevins leur
jetaient des gâteaux secs ou "casse-museaux" en disant
"protège-nous pour l'année à venir".
à propos de la
jeune fille ou femme de bonne allure aux manches pagodes
et des légendes poitevines:
Cette femme se
retrouve en plusieurs endroits sur les sculptures de Talmont sur
Gironde:
-Rampante devant un dragon dans la partie
inférieure de l'arcade de gauche
-Lors de la décollation
-Sur le chapiteau du pilier de transept N-E derrière un
chevalier combattant un dragon.
S'il s'agit de la
même personne la scène sur un chapiteau central du
porche baptisé "décollation de St Jean baptiste"
n'a pas de liens avec la légende ou la vie de Sainte
Radegonde à moins qu'il s'agisse de l'assassinat de son
frère par le roi son mari et non de la
décollation de Jean.
Je ne sais si la
légende ( du XIIIe) s'est inspirée de la
représentation de cette noble femme
représentée face au dragon _ou si c'est l'inverse
_ mais c'est tout de même troublant !
Il n'en reste pas
moins que le sens du chapiteau N-E du transept correspond au
fait d'affronter le Malin avec les armes de la foi que ce
soit selon l'interprétation via Saint Georges via Ste
Radegonde ou simplement en utilisant les critères d'Anne
Blanc ...
|
Voilà
les chapiteaux ont
bien parlé ...
A consulter
pour l'histoire et l'architecture de l'église de Talmont sur
Gironde
le fascicule du Chanoine Tonnelier que l'on trouve en librairie
re-édité:

également chez
DELAVAUD à SAINTES
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L'église de Talmont
sur Gironde fut traitée dans la série "La nuit
des temps" sur le livre dédié à la
"SAINTONGE ROMANE" pages 231 à 235. Collection
"ZODIAQUE" Édité en 1970 par l'Abbaye de la Pierre
qui Vire (Yonne) Épuisé.
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