Le mausolée

de  GALLA   PLACIDIA

à RAVENNE


Photos:  Bernadette PLAS et Alain DELIQUET

Texte d Alain Deliquet et panneaux à proximité. 

Le mausolée de GALLA PLACIDA à RAVENNE

En fait un sanctuaire privé.

Car Ravenne, c'est d'abord un empilage de briques agencées avec un talent discret, mais sûr. Il faut dire que la brique ravennate n'est pas le matériau insipide dont notre XIXe siècle faisait des fabriques ou des ateliers. C'est une plaque de terre large et plate, qui a gardé quelque chose du feu de sa cuisson. Sa longueur inégale, utilisée avec art, forme des séries de rythme légèrement différent, qui se lisent comme le poème muet, fait de longues et de brèves, d'une sorte de morse architectural. Elle est posée sur une couche épaisse de mortier, qui la met en relief et lui confère une valeur individuelle qu'elle perd dans les appareils plus serrés. Sa couleur, qui n'est pas uniforme, tire tantôt vers le jaune, tantôt vers la terre brûlée, et joue avec la lumière une sonate murmurée qui nous rappelle que le mot «ton» convient à la peinture et à la musique.
Cette brique aussi difficile à modeler qu'un morceau de verre, le maçon 'savait la faire tourner en arrondis parfaits, en soleil au-dessus des portes, en arcatures saillantes dont la bande verticale s'insère peu à peu et disparaît dans le socle de l'édifice, à la manière des arcs en aile de poulet de nos églises gothiques. Parfois il la plaçait de biais, en angles contrariés, pour former une frise ou une corniche, mais il la disposait le plus souvent comme les traits horizontaux d'une gravure, avec d'imperceptibles variations d'une ligne à l'autre, sans autre décoration que de loin en loin une colonnette blanche pareille à un bout de cordelière sur une bure franciscaine. Tous les monuments des Ve et VIe siècles sont ainsi faits. Les dehors écorchés de la simplicité évangélique, je veux dire sans ces revêtements de marbre qui sont la peau des architectures tournées vers le monde, mais au-dedans l'âme, sa prière et ses émerveillements : les mosaïques sous leur écorce de brique, et qui brillent depuis quinze cents ans comme un feu de joie chrétienne entre le crépuscule de l'empire et la nuit des temps sauvages.
(André Frossard dans l'évangile selon Ravenne
livre recommandé par notre sympathique guide.)



QUI était GALLA PLACIDIA ?


Galla Placidia née en 388 à Thessalonique et morte le 27 novembre 450 à Rome, fut impératrice. Elle était la fille de l'empereur d'orient Théodose Ier (379-395), petite fille  de l'empereur Valentinien Ier, demi-soeur des empereurs Arcadius et Honorius, elle épousa le roi wisigoth Athaulf, puis l'empereur romain d'occident Constance III (421). Elle joua un rôle politique durant les années 410 à 440, à une époque où le pouvoir impérial avait  établi à Ravenne sa capitale en 402, la plupart des territoires de la péninsule étant envahis.

 Le roi des Wisigoths Alaric Ier vient de piller Athènes en 396 et Rome en 410, il se dirige vers le sud de l'Italie, mais il décède la même année et est remplacé par Athaulf qui régna de 410 à 415. Athaulf fait alliance avec l'empereur romain Honorius, ce dernier lui offre ou confie l'Aquitaine qui est en difficulté avec des envahisseurs saxons. Athaulf y est reçu en pacificateur à Bordeaux, Toulouse et Narbonne. Galla épouse Athaulf, d'abord selon le rite wisigoth à Forli en Émilie-Romagne, puis quelques années ensuite, en 414 à Narbonne selon le rite romain, Narbonne étant devenue entre temps la capitale des Wisigoths. Bien entendu Galla a suivi son époux et y met au monde son premier enfant Théodose en 415, lequel décède en bas-âge et dont certains pensent que ce mausolée lui était destiné.
Athaulf est assassiné peu après, son assassin assassiné à son tour et Wallia proche d'Athauf  devient roi des wisigoths en 415, ce dernier refait alliance avec l'empereur romain Honorius qui est à Ravenne. Honorius, sans héritier, impose à Galla Placidia sa demie-soeur, le mariage avec Constance qui deviendra empereur sous le nom de Constance III, elle lui donnera Honoria vers 416 et Valentinien, né à Ravenne en 419. Constance III décède en 421 et Honorius éloigne Galla et ses deux enfants à la cour de Théodose II à Constantinople.
Honorius meurt en août 423.Galla obtient le soutien de Théodose II contre un usurpateur. Au printemps 425, il envoie en Italie une armée dirigée par le jeune général Aspar, de religion arienne, qui prend rapidement Aquilée. Galla Placidia s'installe dans cette ville et gouverne au nom de son fils Valentinien III. Aspar prend ensuite Ravenne. Le 23 octobre 425, Valentinien III est proclamé empereur à Rome, mais Galla Placidia préfère maintenir sa cour à Ravenne, mieux défendue par une ceinture de marais.

Ainsi Galla PLACIDIA a vécu entre deux mondes, l'orient et l'occident, trois peuples: les orientaux, les romains et les goths et plusieurs religions chrétiennes.
Plan


Texte des panneaux :

Une ancienne légende soutenue par les recherches de Corrado Ricci, a  fait croire depuis longtemps que ce petit bâtiment était le tombeau de l'impératrice Galla Placidia. En fait, la critique historique moderne et un examen attentif des sources, démontre que Galla morte en novembre 450, a probablement été enterrée dans la rotonde de Santa Petronilla, près de la basilique Saint-Pierre au Vatican. Ce bâtiment serait plutôt un  mausolée de la famille Théodosienne. 

GALLA PLACIDIA MAUSOLEUM


Aucun document ne montre que le mausolée a été construit au nom de Galla Placidia, mais il est probable qu'il a été initialement placé sur l'extrémité sud-est du portique de l'église de Santa Croce et que l'église et ce mausolée ont été commandés par l'impératrice elle-même. La pomme de pin en marbre sur le toit du mausolée et de nombreux symboles funéraires dans les mosaïques à l'intérieur, inclinent à penser que l'ancien but du bâtiment devrait être des funérailles, mais bientôt le mausolée a été utilisé comme chapelle privée consacrée au martyr de Saint-Laurent.

l'église et le mausolé
L'église et le mausolée tels qu'ils devaient être du temps de Galla Placidia.
L'église éxiste encore, mais désaffectée et ne se visite pas.
( La façade visible aujourd hui, date du XVIIème siècle ;
 l abside du XVème siècle se trouve maintenant à l ancien point d intersection
entre la nef et le transept. Le clocher date du XVIIème siècle)


Saint-VINCENT Mausolée GALLA PLACIDIA

Le diacre allant vers le martyre est représenté dans cette lunette devant la porte d'entrée.
Selon certains auteurs, le sanctuaire était censé être un martyrium qui est un lieu sacré destiné à conserver les reliques des saints adorées par la famille impériale.

 Saint Laurent né en Espagne au IIIe siècle, diacre à Rome et supplicié par le feu, est célèbre par son martyre particulièrement cruel, mais aussi pour avoir distribué aux indigents les trésors de 1'Église dont il avait la garde, et qui lui paraissaient plus en sécurité chez les pauvres que partout ailleurs. Ce martyr figure également dans la galerie des saints de la basilique Saint-Apollinaire Nuovo, où sa tunique d'or le signale à l'attention toute particulière des fidèles.
 Sous cette mosaïque aurait pu ou du se trouver le tombeau de Galla.


Les noms des évangélistes Mausolée de GALLA PLACIDIA

L' architecture


Des briques grandes et épaisses ont été utilisées pour construire ce petit mausolée à plan en croix latine. De l'intersection des quatre membres se dresse une tour carrée; il cache le dôme semi sphérique à l'intérieur du bâtiment. Étant donné que le plan d'origine du bâtiment est à 1 mètre 50 en dessous du plan réel du site, il apparaît maintenant plus tassé. À l'exception de la façade, tous les murs extérieurs ont des bandes de pilastre se dressant à l'origine sur un mur de briques maintenant enterré. Les pilastres créent des arcades aveugles qui donnent du rythme et du dynamisme à toute la structure. 14 petites fenêtres éclairent le sanctuaire. En 1908, Vittorio Emanuele III, roi d'Italie, offrit en cadeau un verre d'albâtre pour chaque fenêtre. Le mausolée de Galla Placidia a été isolé de l'église de Santa Croce en 1602, lorsque la route via Galla Placidia est devenue praticable.


Le mausolée est sobre, sans prétentions à l'extérieur mais une énorme surprise étonne le visiteur lorsqu'il entre à l'intérieur: la décoration est fine et somptueuse et l'ambiance est calme et reposante. Les parties supérieures sont entièrement recouvertes de mosaïques où prédomine le bleu indigo, le côté inférieur des murs au contraire, est recouvert de marbre jaune de Sienne, presque entièrement dû à une restauration. À l'origine, les dalles étaient jaune ancien, car certains fragments survivent et le prouvent.


Toute la décoration en mosaïque transmet un message funéraire unique: la glorieuse croix est le chemin de la résurrection et de la vie éternelle. Dans le ciel nocturne bleu foncé du dôme, le Signum Crucis en or est entouré de cercles concentriques d'étoiles d'or. La croix de l'apocalypse est la clé de toute l'iconographie. Aux quatre coins du dôme, nous voyons les Quatre Vivants ailés qui annoncent la seconde venue du Sauveur: l'homme ailé, le lion, le veau et l'aigle.


détail Mausolée de GALLA PLACIDIA
Détail de la mosaïque
H se réfère à Honorius et L à Laurent.

Mausolée de GALLA PLACIDIA Une des plus belle mosaïque paléochrétienne

Le Christ imberbe est revêtu d'une tunique d'or et d'un manteau pourpre (clin d'oeil aux empereurs).
Son bâton de berger est une croix d'or, et son visage est nimbé,
il est représenté assis, au centre de six brebis qui toutes le regardent.
 

La croix est acclamée par les huit apôtres qui se tiennent dans les quatre grandes lunettes aux extrémités du tambour du dôme. Dans la lunette au-dessus de la porte, le  Bon Pasteur le Rédempteur, le roi victorieux contre le péché et la mort règne dans le ciel. Il garde la croix glorieuse dans sa main et il accueille les Justes, représentés par les moutons qui le regardent tendrement. Dans la lunette opposée,  Saint-Laurent marche vers le martyre, c'est-à-dire le gril brûlant. Le saint diacre romain porte un livre ouvert et la même croix du salut, que le berger mystique devant la porte du ciel.


détail du ciel

Ce thème de la rédemption est corroboré par les mosaïques des deux lunettes latérales où deux couples de cerfs boivent de l'eau bleu clair d'un petit lac.
L'iconographie et l'iconologie du mausolée de Galla Placidia sont strictement liées à la fois à l'orthodoxie impériale contre l'hérésie arienne et à l'église de Santa Croce à laquelle elle appartenait. La conceptualisation élevée et complexe de l'argument a été développée par la culture théologique de le métropolite (archevêque) Peter I Crisologo (426-450)  conseiller de l'impératrice, considéré comme Saint par les catholiques et les orthodoxes.



Le mausolée renferme trois sarcophages :


Le plus beau est dit de "Valentinien" son fils avec lequel elle a gouverné, né du second mariage avec Constance III.



sarcophage Mausolée de GALLA PLACIDIA


Le sarcophage dit "de Valentinien" dans le mausolée de Galla Placidia.


On peut voir aussi le sarcophage dit " de CONSTANCE III ":

Constantius général en chef des armées romaines après la mort de Stilicon. Il devint empereur, épousa la fille de Théodose Ier, Galla Placidia, veuve d'Athaulf roi des Goths. C'est Honorius, sans héritier, qui imposa à Galla Placidia, sa demie-soeur, ce mariage avec Constance qui devint empereur sous le nom de Constance III, elle lui donna Honoria et Valentinien (sarcophage précédent), né à Ravenne en 419. Ce sarcophage n'aurait pas été terminé puisque sa face arrière et un des côté sont dépourvus de sculptures.


sarcophage Mausolée de GALLA PLACIDIA

Mausolée de GALLA PLACIDIA

D'autres sarcophages se trouvent à l'extérieur:

Mausolée de GALLA PLACIDIA

Un lien très complet sur le mausolée :
http://thierry.jamard.over-blog.com/2016/06/ravenne-03-le-mausolee-de-galla-placidia-mardi-7-mai-2013.html
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Le plan du centre de Ravenne :

Plan de Ravenne

Ravenne est comme la fiancée du Cantique, sa beauté est tout intérieure. On entre dans la ville par cinq ou six portes anciennes que l'abolition des remparts a changées en arcs de triomphe, et qui ouvrent sur des alignements disparates de constructions assez basses où le vénitien s'encastre dans le baroque et le moderne dans le paléochrétien.
 Peu de monuments attirent l'attention par la hardiesse de leur construction. La discrétion est la règle, et même les fanfares architecturales du baroque rendent des sons étouffés. Mais tous les siècles où, il s'est bâti quelque chose sont représentés, depuis ceux de la Rome ancienne qui à vrai dire ne subsistent plus que sous la forme de débris épars, resurgis d'un sous-sol aux archives désordonnées ; le temps, comme la mer, a ses coquillages. Par comparaison avec la plupart des villes italiennes, le calme de cette petite capitale de cent mille habitants est remarquable. Les Ravennates marchent vite, et ils ont comme les lézards la propriété de disparaître dans les murs. Ce qui traîne dans les rues, ce sont les Barbares assagis du tourisme culturel.
(André Frossard dans l'évangile selon Ravenne)



Avril 2020/AD troisième semaine de confinement !


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