![]() Les vierges de CORME-ROYAL |
Voici probablement le texte qui inspira les sculptures du XIIe siècle sur les portails de CORME-ROYAL de FENIOUX de PONT l'ABBE d'ARNOULT d'AULNAY de SAINTONGE de CHADENAC et bien d'autres... Voici le drame liturgique en latin avec réponds en langue de chez-nous du XIIe " Les vierges sages et les vierges folles" d'après Freddy BOSSY avec sa permission. L'article intégral paru dans la revue AGUAINE-LE SUBIET éditée par la SEFCO. Le thème est connu aussi sous le vocable de "SPONSUS" |
La source
biblique est une parabole qui se trouve à la fin
de l' évangile selon Mathieu en
§25 versets 1-13 dite des "vierges sages et vierges folles" ou des "dix vierges". 1 Alors le royaume
des cieux sera
semblable à dix vierges qui, ayant pris leurs lampes,
allèrent à la rencontre de l'époux.
2 Cinq d'entre elles étaient folles, et cinq sages. 3 Les folles, en prenant leurs lampes, ne prirent point d'huile avec elles ; 4 mais les sages prirent, avec leurs lampes, de l'huile dans des vases. 5 Comme l'époux tardait, toutes s'assoupirent et s'endormirent. 6 Au milieu de la nuit, on cria : Voici l'époux, allez à sa rencontre ! 7 Alors toutes ces vierges se réveillèrent, et préparèrent leurs lampes. 8 Les folles dirent aux sages : Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s'éteignent. 9 Les sages répondirent : Non ; il n'y en aurait pas assez pour nous et pour vous ; allez plutôt chez ceux qui en vendent, et achetez-en pour vous. 10 Pendant qu'elles allaient en acheter, l'époux arriva ; celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et la porte fut fermée. 11 Plus tard, les autres vierges vinrent, et dirent : Seigneur, Seigneur, ouvre-nous. 12 Mais il répondit : Je vous le dis en vérité, je ne vous connais pas. 13 Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l'heure. Autre traduction:
1 Alors il en sera du
Royaume des Cieux comme de dix vierges qui s'en allèrent,
munies de leurs lampes, à la rencontre de
l'époux.
2 Or cinq d'entre elles étaient sottes et cinq étaient sensées. 3 Les sottes, en effet, prirent leurs lampes, mais sans se munir d'huile ; 4 tandis que les sensées, en même temps que leurs lampes, prirent de l'huile dans les fioles. 5 Comme l'époux se faisait attendre, elles s'assoupirent toutes et s'endormirent. 6 Mais à minuit un cri retentit : “ Voici l'époux! sortez à sa rencontre ! ” 7 Alors toutes ces vierges se réveillèrent et apprêtèrent leurs lampes. 8 Et les sottes de dire aux sensées : “ Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s'éteignent. ” 9 Mais celles-ci leur répondirent : “ Il n'y en aurait sans doute pas assez pour nous et pour vous ; allez plutôt chez les marchands et achetez-en pour vous. ” 10 Elles étaient parties en acheter quand arriva l'époux : celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et la porte se referma. 11 Finalement les autres vierges arrivèrent aussi et dirent : “ Seigneur, Seigneur, ouvre-nous ! ” 12 Mais il répondit : “ En vérité je vous le dis, je ne vous connais pas ! ” 13 Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l'heure. |
Les
sculpteurs
du XIIe représentèrent les vierges
sages la tête
haute et portant une lampe à huile en position normale tandis que les vierges folles penchent la tête et tiennent leurs lampes renversées. Au centre se trouve le Christ tout en haut, Il tient du coté vierges sages qui sont à sa droite une porte ( ou un volet ) ouverte tandis que celle-ci reste fermée pour les vierges folles. |
Ce
thème est celui de l'entrée au royaume des cieux lors de la parution
devant Dieu. Il reconnaîtra ceux qui s'y sont préparés et ignorera les autres ! C'est un appel à la Vigilance, à se tenir toujours prêt! On le retrouve essentiellement sur les portails romans de cloîtres ou prieurés réservés aux femmes, Les nones doivent être prêtes lorsque l'Epoux mystique viendra les chercher ! Eh non ce n'est pas l'apologie de la polygamie, ni un message de générosité ( les vierges sages n'ayant pas voulu partager leur huile), ni un message pour envoyer les vierges se promener vers minuit dans les rues !! C'est à prendre au troisième degré !! |
Vierge folle FENIOUX |
(6). Emploi de la
Langue. — Structure. Le poème compte 95 vers ; la moitié seulement a été rédigée en parlange, le reste étant latin. Sur quel critère l'auteur s'est-il basé pour alterner ainsi latin et dialecte ? Le chœur (qui n'a qu'un rôle d'introduction) et les Vierges (à l'exception d'une strophe, vers 66 à 70) parlent latin. En revanche, l'archange Gabriel, et Jésus même (8), ainsi que les marchands d'huile, utilisent le dialecte. Le latin ni le parlange ne sont donc, ici, à considérer comme particuliers à certaines classes sociales, comme c'est le cas dans les pastorales bilingues limousines où le « monsieur » parle français et la bergère répond en « patois » — ou chez Molière, où la langue rurale n'est qu'un prétexte à ridiculiser les paysans (cf Dont Juan, M. de Pourceaugnac, etc.) (9) Je propose cette explication : les fidèles ne comprenant pas le latin (l'énorme majorité) pouvaient parfaitement suivre l'action avec les seuls vers en parlange. Les vers dialectaux se répartissent ainsi : a. Vers 11 à 30 : quatre strophes de trois décasyllabes, chacune suivie d'un refrain composé d'un penta et d'un décasyllabe ; b. Vers 35, 40, 45 et sq : refrain (hendécasyllabique) repris onze fois, après chaque strophe, même latine, mais avec les deux formes de l'auxiliaire : avem/auet (avons/avez) ; c. Vers 66 à 79 : trois strophes de quatre décasyllabes ; d. Vers 93 à 95 : trois décasyllabes. Soit 46 vers en parlange. Retenons surtout de cela, à l'usage de tous ceux qui craignent de se déshonorer en parlant « patois », que l'auteur de notre texte n'a pas hésité, et dans une église qui plus est, à faire s'exprimer Gabriel et Jésus dans la langue de tous les jours — ce qui constitue, il me semble, un précédent de poids. (7) Par ailleurs Coussemaker
signale la même scène aux vitraux de REIMS et de
LAON.
(8) Sauf les deux septénaires (tétramètres, trochaïques ,catalectiques !) (9) Sur Molière et les dialectes voir: A. DAUZAT "Les patois " Paris 1927. |
7. Texte et traduction.
— Partition. On trouvera vis à vis le texte et sa traduction ainsi que la partition neumatique et son essais d'interprétation moderne. Le texte latin est imprimé en romain permanent et le texte dialectal en italique; enfin les crochets encadrent ce qui a été restitué au texte original. Les petits chiffres placés en exposant renvoient au §8, ou les mots font l'objet d'un bref commentaire linguistique. Les textes (latin et parlange) sont ceux de Cloetta. En effet, à la différence des autres éditeurs, il s'est attaché à restituer au plus près la langue d'origine, s'appuyant sur d'autres (rares) textes existant pour la région envisagée, et surtout sur une étude minutieuse de la versification, qui lui a permis d'éliminer nombre de lapsus, au lieu de publier le manuscrit tel quel, avec ses incohérences et ses erreurs manifestes (10). De même, le latin a été rendu à son orthographe classique. La traduction, quant à elle, est inspirée de celle de Thomas ; elle n'a aucune prétention littéraire. De Thomas également sont l'équivalence musicale (la transcription ancienne est due à Coussemaker) et les indications scéniques (le plus souvent restituées). (10) Ces
différences ne portent cependant que sur des
détails ; mais le lecteur qui voudra détailler
les textes sous les partitions en contestera quelques unes.
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Fin de l'introduction de Freddy BOSSY. |
suite du texte de Freddy Bossy: |
8. La
Langue. — Notes sur le texte. Le lecteur profane aura sans doute eu quelques difficultés avec ce texte qui ne ressemble en rien à son « patois » (15). A première vue, on peut être surpris par l'allure nettement occitane du document. D'une part, elle est due au(x) scribe(s) de St-Martial (voir § 3), mais d'autre part, il faut bien, considérer que ce poème est antérieur d'un siècle environ à tous les autres textes en parlange connus pour nos régions — et nous ne savons que très peu de choses sur l'état des dialectes du centre-ouest aux lendemains de l'an mil. |
A. LECTURE.
Quelques remarques sur la prononciation simplement : l'orthographe médiévale est phonétique, c'est-à-dire que toutes les lettres notées se prononcent (par exemple : merchaans, achapter, etc.). Cependant : _ Le o note souvent ce que l'on prononce ou (vos, espos, los vostres, etc.) ; _ le
-a
« féminin » (posttonique final libre) de
: terra, dolenta,
chaitiia, domna, naja,
etc., est encore attesté au XIV e siècle. dans
des
chartes en parlange provenant de la région saintaise (16).
Il
s'agit manifestement d'une survivance orthographique ne correspondant
plus, depuis longtemps, à la prononciation qui
était -e.
La force de l'habitude ayant prévalu, les
tabellions continuèrent à noter -a ce qu'ils entendaient -e (comme de nos jours, on
graphie haut ou eaux ce qui se dit ô.
15 Le sujet étant
par trop ardu pour un public non
spécialiste, je me contente ici de donner les indications
générales. On trouvera une typologie dans
Cloetta, op.
cit.16. Voir: "Droits du roi de France contre les prétentions de Foulque de Matha " (Revue des Sociétés savantes des Départements, tome V), fin XIIe-début XIVe siècle, avec une seule attestation: la guarena (garenne), quatre occurrences. _"Requête présentée au Sénéchal de Saintonge par Marguerite de Montendre contre Geoffroy de Pons" ( in archives historiques de la Saintonge et de l'Aunis, tome XIII, 1883), vers 1325; très nombreuses attestations, entre autres: _dame Poinsa, laquuila fu donea..; _ contra un autra homa... etc. De même, en très ancien français, le -a a également valeur de -e: "in ajhuda et in cadhuna cosa" = en aide et en chaque chose (serments de Strasbourg, 842); ou encore: "buena pulcella fut Eulalia" = bonne pucelle fut E. 'cantilène de Ste Eulalie), vers 881ou forme conjuguée de devoir), creit (croissance, ou forme de croire), veie./vée (voie, chemin du marais salant), etc. 17. Le manuscrit de Pons |
B. NOTES DIVERSES.
1. Le -t final
représente le groupe -ts,
qui était graphié -z (ou -s) en ancien
français (d'où les pluriels actuels gent/gens, tout/tous, un
pont/la ville de(s) Pons,
etc.)-Ici, on trouve ce t
= ts dans quatre cas :
a) A la 2e personne du pluriel des verbes : oiet, aiet, atendet, dormet,
etc. (oyez, ayez, attendez, dormez) ;b) Dans le mot crot (croix), au v. 22, issu du latin cruce, représenté en occitan par crotz ; c) Aux participes passes (cas sujet singulier) : net, lavet, bateiet, batut, dormit, etc. (né, lavé, baptisé, battu, dormi, + s de flexion). Si ce -t est toujours bien vivant, un peu partout, en liaison, il est articulé systématiquement en Oléron notamment; d) Dans : pechet (v. 16), vost (v. 76) et tot (v. 94), où il est la marque du cas régime (= complément) pluriel (péchés, tous, vos). 2.
La série des démonstratifs n'est
représentée que par aiso et aici, du
type acce-
(sans aphérèse) caractéristique du
sud-ouest. Voir aussi n° 6 b.
3.
La désinence -om
de
la 1è pers. du pluriel est constante en saintongeais (et
dans
tout l'ouest) à toute époque : dans les chartes
anciennes, où elle alterne avec -un, -um, -on (qui ont
même valeur) ; dans le Manuscrit
de Pons, sous la graphie -onme(s) ; dans la Mérine à
Nastasie, où le Dr Jean écrit -ons-m' devant
voyelle ; etc. (17).
Dans le cadre
d'une orthographe unifiée du parlange, il serait souhaitable
que cette graphie -om (ou -on) soit restaurée.Voir aussi n° 16. 4.
La tournure aiet presen
que fait problème ; Thomas la «
partez dès que » — mais cela ne
correspond pas au contexte.
. Comme
à la finale (cf n° 8), le -a- prétonique a
été conservé dans la forme du futur comandarom (commanderons), ainsi que dans
l'adverbe lojamen (longuement) (v. 72). Il est
passé à -e- beaucoup plus tard qu'en
position finale.6. Les formes contractées. On en rencontre plusieurs dans ce texte : a)
Articles et pronoms enclitiques :
noi (v. 14 et passim) = non + y ; eu (v. 18 et 23) =
en + le ; deus
(v. 68) = de + les ; nou
(v- 73) =non+le.
A noter que, dans le texte, j'ai systématise l'apostrophe qui simplifie la compréhension mais peut introduire une faute de lecture, car il s'agit bien de monosyllabes. b)
Avec aici : aici's
et pr'aici.
La seconde forme est composée de pré (voir
n° 9). Quant à aici's
= aici es
(ici est), il s'agit de la tournure présentative habituelle
à beaucoup de langues, dont l'occitan.
7.
venit
(v. 16), venra
(v. 28 et 79) : ces deux formes (passé et futur) du verbe
venir
sont toujours utilisées telles quelles en saintongeais
(encore
que, sous l'influence du français, on entende de plus en
plus vindra (avec
-d-épenthétique) que vinra).
8_Pour le -a final féminin = -e, voir ci-dessus (sub Lecture). 9. pré,
pr : les
deux prépositions issues du latin per et pro (par et pour) sont ici
confondues, comme dans la langue moderne où l'on entend, le
plus souvent, pe(u)r dans les deux cas.
10. los, article défini masculin régime pluriel, est inhabituel dans un texte du centre-ouest, quoique latent. On attendrait les. 11. Auxiliaire être. — Les formes du présent soi (v. 27) et son (v. 94) (suis et sont) sont normales, de même que le futur seret (v. 95) (serez). Par contre, le passé fo (v. 17 et 21) (fut) est plus rare, même à cette époque. Ester (v. 68 et 71), du latin stare, a le sens du saintongeais actuel rester, c'est-à-dire habiter, demeurer. 12. Bateier est la forme phonétique normalement issue de batidiare (du latin ecclésiastique baptizare) — occitan batejar, ancien français batoier. L'actuel baptiser est un doublet du XIV e environ. A propos de bateier, rappelons l'évolution du é tonique roman (latin ë, ï), qui aboutit à oë/oi en français, mais à ei en poitevin-saintongeais ; par exemple deit (doigt,ou forme conjuguée de devoir), creit (croissance, ou forme de croire), veie./vée (voie, chemin du marais salant), etc. De plus en plus (et déjà dans les chartes médiévales) les formes en oé envahissent notre parlange, altérant un de se traits les plus caractéristiques. 13. eu =il (vers 21 et. 27). Celle forme pronominale est rare; elle est représentative "d'une particularité dialectale qui pourrait remonter très haut " dit Cloetla; de fait, sauf dans Ste Catherine (17) qui a le même pronom , mais sous la forme el, on ne rencontre que il dans les textes qui sont il est vrai, postérieurs d'un siècle au moins. 14. Le o (ou), pronom neutre complément, est attesté ici deux fois : la scriptura o dii = l'écriture (z) ou dit, et, au vers 79, faites o tost = faites-ou tôt. C'est une des principales caractéristiques du poitevin-sainlongeais. |
15. trames est un
composé de mis
(du verbe trametre
= transmettre, envoyer)
16. Face à la désinence -om -n°3) on trouve deux fois la désinence em: avem, poem (avons, pouvons) , qui est peut-etre un occitanisme, mais reste sporadiquement attesté en centre-ouest; par exemple aguissem à Tonnay-Charentes en 1230 , fazem (faisons) à Angoulème en 1260, et plusieurs exemples dans Ste Catherine. Notons qu'il ne sagit ici que de la 2è conjugaison latine -ëre. 17.Oli. Ce mot n'est, dans aucune langue, phonétiquement normal. En effet, les formes de l'ancien francais uile et oil, de l'occitan ôli, du poitevin-saintongeais eule, etc... ont été influencées par le latin ecclésiastique oleum. On constate d'ailleurs que, sur occurences dans ce poème, c'est la seule qui soit dialectale, meme au vers 78 ou oléo forme une incise latine dans le texte en parlange. De même, virgine(s) (v. 11 et 17) et scriptura (v. 26) ont été laissés en latin dans le texte dialectal, car ils appartiennent au parler de l'Eglise. La forme eule fait état d'un autre trait phonétique de nos parlanges, l'évolution de o + y en œ. Comparer huitre/eutre,muid/meu (lexique saunier), l'ancien français suiere/seure (suaire), etc. |
18.
achapter (—
acheter) semble nord-occitan. Néanmoins, il a
pu être utilisé sinon en Saintonge, du moins en
Angoumois.
On peut d'ailleurs très bien avoir des formes communes oecitan/poitevin-saintongeais sans qu'il s'agisse d'emprunts ni même d'influence. De même, une forme phonétique normale peut avoir l'air française mais être purement dialectale. Ce sont les pièges de la phonétique historique. 19. cosel : « conseil » avait, tant en ancien français qu'en occitan, le sens, entre autres, de secours, aide. Notons, à propos de ce mot, la chute fréquente du n après voyelle dans ce poème : no(n) (passim), Jorda(n) (v. 18), loin) jamen (v. 72), co(n)ven (v. 71), e(n)fern (v. 95), et dans le mot jor(n)s (v. 94). Ce trait est latent dans les textes très anciens du centre-ouest. 20. chaitiva = chétive ; le sens est le même que celui du poitevin-sainlongeais actuel chèli (méchant, malin), dont le féminin a été refait en chétie (mais Vendée : chétive). 21. La désinence -eia représente le latin -ata du participe passé féminin, les trois formes à la rime malaureia, livreia et meneia , sont une précieuse attestation de l'évolution de la dentale en yod (à moins qu'il ne soit destiné qu'à éviter le hiatus). |
CONCLUSION Au terme de cette étude, simplifiée au maximum en ne faisant pas état, délibérément, de nombreux problèmes de tout ordre, quels enseignements retirer de ce poème ? Historiquement, il s'agit donc, d'une part, du plus ancien texte connu en parlange pour le Centre-Ouest, et, d'autre part, du premier drame liturgique en langue vulgaire. Pour les musicologues, le fait qu'il nous soit parvenu avec sa notation neumatique clairement déchiffrable a aussi une grande importance (non exploitée dans ces lignes). Dans le domaine théâtral, nous l'avons vu, cette pièce a permis, au temps de sa découverte, de mieux dater les origines du drame liturgique. Ces vers apportent également d'intéressantes informations et sur la liturgie médiévale, et sur les pratiques religieuses rituelles. Mais le plus important des enseignements, celui que je me suis attaché à étudier ici, est celui de la langue. On admet désormais qu'il s'agit d'un poème composé en oïl et transcrit en oc, mais les problèmes débattus à ce sujet sont considérables — comme d'ailleurs pour tout teste de langue très ancienne (ainsi des Serments de Strasbourg, attribués à peu près à tous les dialectes français, et même récemment au poitevin). Retenons simplement qu'il s'agit d'un drame religieux du xr siècle, vraisemblablement de l'Aguiaine. Si je me suis attaché à le publier, c'est parce qu'on nous a trop privés de notre culture ancienne, et que, s'il est indispensable de collecter les formes orales de cette culture ethnique, il est aussi important de faire connaître nos textes anciens, aussi peu nombreux soient-ils. Ainsi prouverons-nous que le parlange était utilisé par tous, écrit et reconnu. Enfin ce texte, dans sa sobriété extrême, ne pourrait-il pas revivre en quelque groupe d'expression populaire, témoignant ainsi de la pérennité de notre culture ? Freddy BOSSY. |
Cet article provient intégralement du N° 100 Sept_Oct 1980 de la revue AGUIAINE-LE SUBIET :
FIN_juillet 2010, rev sept 2011/rev 2019/rev 2023 |