Vers le site du groupe Oléronais "Les Déjhouqués"

LES COIFFES OLÉRONNAISES

d'après les recherches

d'André BOTINEAU

« A  l'aviant  portant  pas  d'sous,

d'aut'foué... mais n'en aviant elles,

de thiéllés couéffes ! ... et des belles ! »

Le musée de la coiffe à GRAND-VILLAGE se visite

se renseigner à l'office de tourisme:

3, Boulevard de la Plage - BP.14, 17370 LE GRAND-VILLAGE-PLAGE
tél. 05.46.47.58.00
télécopie : 05.46.47.42.17
Courriel : grdvillageplage@wanadoo.fr

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André BOTINEAU

Le groupe folklorique Oléronais sous la houlette d’André Botineau  a fondé le musée de la coiffe de l’île d’Oléron, enrichi par de nombreux dons en particulier les coiffes offertes par Francis Millerand.

La plupart des indications ci-dessous ainsi que les photos en noir et blanc   proviennent des recherchent de Mr Botineau tandis que les photos sur mannequins ont été prises au musée

Qu’ils soient chaleureusement remerciés.


Par sa coiffe, l'Oleronaise laisse entendre qu'elle est jeune ou vieille, pauvre ou plus ou moins aisée, qu'elle passe un moment heureux de sa vie ou bien qu'elle est en deuil ou en demi-deuil.

« espérez in moumagri jhe seu en jh'veur » (attendez un moment, je ne suis pas coiffée (1) .

Madame, donc, après avoir retiré son bonnet de nuit en percale attaché sous le menton et qui renfermait sa chevelure, mouille ses longs cheveux, les lisse à l'eau ou à la vaseline, les tire en arrière, les aplatit sur sa tête fait sa raie au milieu et ses « soles », c'est-à-dire les crans, qui sont de chaque côté de cette raie. Puis elle fait son chignon ou ses nattes. Elle met alors un bandeau de coton blanc sur ses « soles », laissant dépasser sur son front deux ou trois doigts de cheveux. Large de trois ou quatre centimètres, ce bandeau va d'une oreille à l'autre. Deux petits galons, un à chaque bout, noués ensemble par une « rosette » sur le dessus de la tête, le maintiennent. Si l'on est plus riche, ou seulement le dimanche, le bandeau de coton est remplacé par un velours noir, de même largeur Ensuite, on met la « résille » (2) de couleur noire en général, pour couvrir les cheveux ou le « serre-tête » qui est une calotte de fine percale blanche, pour ne pas salir la coiffe qui va venir. La tête est prête, quelle que soit la coiffe que l'on portera.

Le bonnet de jour LE BONNET
  C'est une coiffe qui se moule sur l'arrondi de la tête : il enferme toute la chevelure ou presque. Le bonnet des jours est en - piqué de coton -, étoffe façonnée lors de son tissage pour former des ornements qui paraissent exécutés à l'aiguille. Cette coiffure est constituée de deux pièces principales :

a) une bande frontale qui va d'une oreille à l'autre. C'est la « passe «.

Sa largeur est de 4 à 6 cm pour coiffer une femme âgée (elle s'appelle alors la a patte ) et ne fait que 2 à 3 cm pour une jeune femme. La jeunesse choisît du piqué à fleurettes et laisse aux grand-mères le piqué à bandes ou à rayures qui fait plus sobre et plus sérieux.

le bonnet de jour Les fillettes portent le bonnet de jour qui est aussi bonnet de nuit dès le plus jeune age. quich'not et coiffe de jour

b) Sur la patte ou la passe est rapporté le second élément : la poche qui enferme les cheveux et qui est plissée de chaque côté de la tête, en quelques-unes ou en multiples «fronces « au goût de la cliente.

Tout-à-fait sur le front, une dentelle de « picot " de coton orne le devant de la coiffe et apporte un peu de gaicé. A l'arrière, les cheveux se trouvent soigneusement enclos dans la poche du bonnet, qui se referme en tirant deux petits galons glissant dans une coulisse et qui viennent se nouer au sommet de la tête, en formant une rosette.

Enfin, deux galons en percale de 4 cm de large et de 40 cm de long sont cousus près des oreilles et après avoir été bien amidonnés et aussi repassés (comrne toute la coiffe) noués sous le menton, forment une magnifique rosette de 10 à 15 cm. Quelquefois, lors d'un gros travail, ces « attaches * sont nouées, elles aussi sur la tête, pour « débarrasser » le cou. Ainsi, le bonnet peut rester toute la journée sur la tête. Si la femme va aux champs ou à la côte, elle prend par-dessus son « Quichnot » ou bien son mouchoir de tête.

« Encouér ine affaire de mée » Ce bonnet des jours, lorsqu'il est agrémenté d'un ou plusieurs rangs - levés » ou « couchés » (11) de dentelle étroite et tuyautée au fer chaud, devient une "coiffette".

Colette CAILLOT en coiffette LA COIFFETTE

La coiffette est portée par une jeune fille dont le cœur est à prendre

Elle se porte pour aller au marché, à la messe, au bal. Ses attaches sont plus longues, plus larges. Il s'y trouve à la fois mousseline, percale et petite bordure de dentelle. Elles ne sont plus attachées sous le cou mais restent mobiles et libres dans le dos. Les personnes âgées, ou en deuil, qui ne veulent pas «Se mettre enfrau», ajoutent à leur bonnet, un tuyauté de mousseline sur le devant et des attaches tout en mousseline.

Lorsqu'on commençait à vieillir, le deuil père, mère, frère ou tante... Et quand on se croyait libéré de ces obligations conventionnelles, il était bien rare qu'on ne retombe pas quelques temps après au port de la mousseline, parce qu'un proche parent venait de <• partir au ciel »
Fort simple, la coiffette est constituée d'un bonnet rond, en plusieurs éléments. On la serre sur l'arrière par un galon coulissant dans un ourlet. La partie essentielle en est une bande de tulle large de dix à douze cm et décorée'des plus jolis motifs floraux de broderie. Le fond, plat d'abord, part du devant de la tête, en suit l'arrondi et vient s'arrêter au-dessus du chignon, bas et apparent, ou au-dessus des nattes. Les deux côtés, taillés en forme, se joignent à ce fond de part et d'autre et auquel ils sont fixés par leurs bords.
Chacun de ces deux côtés est en deux ou trois panneaux très petits, où se juxtaposent, à l'occasion, tulle et mousseline. Chacune QL-S coutures sera masquée par un petit rang de dentelle tuyautée au moment du repassage. Quelquefois tout le côté est en mousseline et « à plis lissés » avec l'ongle pendant l'amidonnage, en un bel arc dont le rayon médian part de l'oreille. Tout le devant de la coiffe, la « patte » sur laquelle fond et côtés sont fixés est décoré de deux à cinq rangs de tuyaux « levés ou couchés », mais toujours très courts, contrairement aux coiffes du continent. Les deux bords de la grande bande centrale en tulle, reçoivent également un ou deux rangs de « tuyauté ».
Tout cet ensemble donne ainsi, à la « fiasqueuse » pour trois ou quatre heures de travail, pendant lesquelles elle n'ira pas user la langue chez la voisine. Tous les tuyaux de cette coiffe qui. habituellement, sont en « Valencienne » sont remplacés par un ruban tuyauté, mais en mousseline lorsque la personne est en deuil, ou très âgée.

A l'intérieur de la coiffe, simplement faufilée et de la largeur de la bande centrale, une bonne doublure de tulle noir raidi à la gomme arabique sert d'armature se portait presque sans interruption : on avait toujours à honorer la mémoire d'un disparu,. La couleur noire de ce fond qui ressort au travers des mailles blanches de la coiffette, sans que ce soit pour autant un signe de deuil, est du plus gracieux effet. Pourtant, afin d'ajouter encore et d'embellir davantage, deux large » barbes « en dentelle, les « brides « sont fixées à l'emplacement des oreilles et pendent à l'arrière, tombant jusqu'à la taille,
Ces brides empesées, larges de huit à dix centimètres, sont repassées à plat pour leur donner bonne tenue. La lingère aura déployé tout son savoir pour mettre en valeur par son travail la qualité de la fourniture employée, en fonction de la « situation familiale » de sa cliente. La bride est bâtie de différentes façons
— ce peut être une bande de dentelle de 4 à 5 cm de large, en tulle brodé, cousue bord à bord pour donner la largeur finale et non coupée, la base se trouvant arrondie en un arc à fronces tuyautées .
— ou bien encore deux modestes « Vaienciennes » de deux centimètres, servant de bordure à' un ruban de mousseline qu'elles encadrent.
— plus simplement encore, une large bande de mousseline avec seulement un petit picot à l'extérieur. Et le temps passe,,, et voilà qu'arri-vent, avec la fin du siècle, de la Capitale, de Rochefort ou bien d'ailleurs, les «baigneuses » et les « parisiennes », Entre autres «atours » elles apportent « zeu chapiâs « et les coiffes ôléronai-ses se transforment. Elles s'essaient au goût du jour, pour bientôt disparaître. « Nous drolésses, v'iant pu d'zeu couéffes, à v'iant se mett' coum' thiel-téi belles madames ». Peut-être à cause de cela, nos dernières ouvrières vont tenter de se renouveler et elles inventeront.

Louisette

Louisette

LE QUICH'NOT quich'not oléronaise

Dans le doute où l'on se trouve de sa véritable origine, le nom de cette coiffure s'orthographie bien différemment. Pour certains elle aurait existé au temps de l'occupation par les Anglais de notre Province, c'est-à-dire du Xlle au XlVe siècle. C'est bien lointain pour que son nom supposé de " Kiss not •• soit venu jusqu'à nous, même si son interprétation naïve en est séduisante.
Dans les patois du Centre et du Midi de la France « quichon « désigne un tas de foin ; la « quich'not » est donc simplement ce qu'elle est : la coiffure de la faneuse. Cette coiffure, on la retrouve dans beaucoup de provinces françaises, sous des formes et des mesures légèrement différentes et sous divers noms.
Dans notre île son nom, contrairement à l'appellation actuelle, n'était pas féminin, mais masculin. On disait autrefois '• un ou mon ch 'not » pour désigner le « quich'not » et c'est ainsi que s'exprime la dernière ouvrière de l'île qui en fabrique encore, plus que jamais et surtout pour les estivantes.

C'est donc... une coiffe enveloppant bien la tête, abritant bien le visage et même le cachant. Elle est en forme de demi-cylindre allongé et possède un fond, plus ou moins plissé et volumineux.
C'est la plus portée et la seule qui existe encore, en tant que coiffe locale, encore qu'elle ne soit plus portée dans sa forme primitive, présentant un arc unique.
Dans une bande de tissus repliée sur elle-même en forme de poche ou plus précisément d'étui était glissée une feuille unique de carton de 40 centimètres de long sur 14 de profondeur. Ces mesures, ici bien spécifiées, sont celles utilisées en Oléron. Les quich'not du continent ou de l'île de Ré dont les dimensions sont tout autres, ont un aspect très différent.

Un large volant retombe jusque sur les épaules, complète cette coiffure qu'un galon étroit, glissant dans une «coulisse », resserre sur la nuque en encadrant la tête d'une oreille à l'autre. Fait généralement de percale blanche, ce Quich'not ancien existait aussi teint en noir, pour le deuil. Dans une forme beaucoup plus courante et plus évoluée cette coiffe se présente en arc à multiples brisures, avec précisément douze étuis où sont enchâssés douze petits cartons qui donnent toujours à la "façon» oléronnaise ses quarante centimètres sur quatorze. Et l'on trouve alors ; coiffe blanche, de percale ou de mousseline de laine noire ; coiffe de deuil de coton noir ; coiffe de mousseline de laine noire ; coiffe de satinette imprimée. Elle peut être sobre, dans sa modestie habituelle, ou encore agrémentée des frivolités les plus variées, tuyautés amidonnés dans les coiffes les plus anciennes, bouillonnes ou ruches répartis sur le devant de la coiffe, sur toutes les nervures et sur la bande inférieure qui bat les épaules, gros nœuds décorant l'arrière du Quich'not chez les jeunes filles, etc... Il est porté par les personnels de toutes conditions et à tous les âges. De mignons petits viennent coiffer les plus jeunes fillettes, cependant que grand-mère, jusqu'à son dernier jour, restera fidèle à son" Ch'not nègue ». 11 ne faut surtout pas oublier que, comme les autres, il ne se porte pas directement sur la chevelure. Le Quick'not était une coiffe pour l'extérieur et on le mettait, sur le bonnet des jours en piqué de coton ou sur le mouchoir de tête (12).
Ainsi, le Quich'not aura-t-il été la dernière de ces coiffures du passé, mais aussi la plus fonctionnelle, car il visait à protéger du soleil et de la morsure du vent le délicat visage des Oléronnaises qui, pour être dures à la peine, n'en étaient pas moins femmes.

Mme GABET de LA TREMBLADE en quich'not de deuil

Le quich'not de deuil
Même dans sa version du deuil, sa simplicité n'excluait pas une certaine recherche.
Après tous, il y a toujours eu des veuves joyeuses... et le noir va si bien à certaines carnations



la CALINE LA CALINE

La calotte est recouverte le plus souvent d'un étui de même forme en coton blanc, fin, qui, sur le devant et dans les deux coins supérieurs, a été plissé « à la poussette » (3). Les plis forment un éventail, représentant des rayons de soleil. Sur la face arrière, pas de décors ; l'étui est resserré et plissé par un petit galon placé dans une « coulisse » et noué derrière la coiffe. Cependant, deux petites ailes sont laissées mobiles, derrière la tête ; leur longueur est variable, selon le goût de chacune et réglée par de petites épingles.
On retrouve la même forme en mousseline de coton uni ou à dessins façonnés, parfois avec un haut en percale et une bande frontale de mousseline et même encore, pour les dimanches, en tulle brodé.
Cette coiffe est amidonnée : elle donne beaucoup de travail à la « fiasqueuse » (4), car les deux coins supérieurs du devant de la câline doivent être décousus avant le repassage et resserrés « à la poussette », après. Elle est portée surtout dans la vie de tous les jours.

LA COLINETTE DES JOURS


La colinette des jours se porte, elle aussi sur la calotte matelassée. Dans toutes les coiffes, les épingles sont employées très largement. Ce sont elles qui fixent toutes les pièces qui la constituent et qui sont indépendantes les unes des autres. Ces pièces sont amidonnées, repassées séparément, puis mises en place sur la calotte, à l'aide des épingles.
Dans la Colinette, un fil de fer ou de laiton est cousu aux deux coins supérieurs de la calotte en formant un petit arc ou « arçon » sur lequel sera posé à cheval le «fond » de la coiffe. C'est une petite pièce de mousseline de coton d'environ 35 à 45 centimètres de long sur 20 à 30 de large, replié sur elle-même par le milieu et fixée sur le devant avec des épingles à la calotte. Sur l'arrière, elle est plissée par un galon, resserré dans une coulisse. Une bande de 6 à 7 centimètres de large, en percale blanche est ensuite placée au bas de la calotte, elle en fait simplement le tour c'est le « tour de tête. Fixée dans sa partie supérieure par un fil simplement faufilé, le bas en est libre : c'est pour permettre de saisir le bas de la calotte, pour placer la coiffe sur la tête.
Enfin, pour terminer, une longue bande de 1 à 1,50 mètre au goût de chacune, et large de 10 à 15 centimètres, est fixée en son milieu sur le devant de la calotte par une épingle. C'est « le pan ».
Chacune de ses deux moitiés est alors conduite sur l'arrière de la coiffe et maintenue sur les côtés et l'arrière par des épingles, de façon à entourer la calotte.
Puis, les extrémités restantes, à peu près le quart de la longueur totale, sont ramenées sur le devant, en laissant beaucoup d'ampleur, ce qui est facilité par la demi-rigidité de l'amidon.
La Colinette se trouve avoir ainsi deux jolies petites ailes qui donnent à ce « capot » sa forme particulière.

Et cette Colinette des jours, chaque femme en possède plusieurs modèles. Et il y a bien dans l'île autant de modèles que de femmes, tant ils sont diversifiés en raison de l'âge, des moyens de chacune et de la fantaisie qu'on se plaît à y apporter.
C'est pourquoi, on pourra trouver cette coiffe avec tous ses éléments constitutifs, soit en percale, soit avec le «fond » en mousseline et le pan en calicot ou mousseline, ou le pan avec picot de dentelle ou sans picot du tout. Le tour de tête lui-même sera en coton ou en mousseline et parfois composé des deux à la fois.

à gauche Chantal en colinette et à droite Louisette en ballon

A gauche COLINETTE & à droite BALLON

LA COLINETTE DES DIMANCHES

Dans sa forme la colinette du dimanche est semblable à la colinette des jours, avec cependant plus d'ampleur dans les dimensions et de richesse dans les éléments qui la composent. La calotte, en est plus neuve, avec des broderies plus marquées ; l'arc de I' « arçon » est plus accentué. Le fond est en mousseline de coton ; elle est u-nie ou brodée diversement : de « plumetis » ou de motifs floraux. Souvent même ; on aura préféré le tulle dit « à fin réseau » ou « à point d'esprit » (6). Ce fond est replié sur l'arçon et la partie placée à l'arrière, possède dans le bas un ourlet dans lequel coulisse un galon plissé en éventail le fond de la coiffe et les deux extrémités de ce « lien » sont repassées en accordéon avec précaution et pendent sur l'arrière entre les deux parties juxtaposées du pan.
Le pan, lui, est fait d'une grande bande, le plus souvent de mousseline brodée, ou de tulle à point d'esprit. Il est entièrement bordé de dentelle dite « de calais » et plus généralement
appelé dentelle de tulle brodé parce qu'elle était agrémentée de petites fleurettes, faites d'un simple fil.Large de 5 à 7 centimètres, on la choisissait ornée dans sa partie supérieure qui était cousue d'un très fin plumetis.. Aux extrémités de ce pan, et dans les quatre coins, la couturière a réservé quelques fronces qui serviront lors du repassage, à l'aide de fers spéciaux, à
les tuyauter très discrètement. Très souvent les tuyaux sont remplacés par un plissé en éventail. Il se fait avec l'ongle sur l'amidon frais et repassé avec un petit fer de fonte de 8 à 10 centimètres de long. Tout cet ensemble est maintenu par une multitude de petites épingles dont les plus apparentes sont garnies d'une perle blanche.

Le ballon de Josette LE BALLON

Nous voici au « Roi des Capots ». C'est une des plus jolies coiffes de France, une des plus importantes aussi, par sa grandeur. Il mesure jusqu'à soixante, parfois même soixante-quinze centimètres de large et trente-cinq ou quarante de haut, suivant l'œuvre de la « faseuse de bonnets ». En effet, dans l'île les « Ballons » sont montés plus
petits au Sud qu'au Nord. Cependant, tous ces capots fabriqués par ces lingères sont faits d'après la « présentation » (7) et la « cargue » (8). Lorsqu'elles portent cette coiffe, les Oléronaises sont obligées de tourner la tête de côté pour passer, de biais, la porte de la maison.
Le Ballon est une coiffe de grandes circonstances de la vie : les cérémonies de mariage, de baptême ou les grandes fêtes votives. Par tradition c'est la coiffe de la mariée que toute « drôles-se » aspire à porter un jour... et la porte parfois même, quand tout espoir s'est envolé.
Bien entendu, la calotte en est neuve, bien plus grande, plus haute et beaucoup plus large que celle de la Colinette et ainsi les angles s'en trouvent très accentués. Le fil qui sert à l'orner, qui est le plus souvent noir est quelquefois remplacé par un fil ayant l'apparence de l'or. Les semis de fleurs à l'arrière sont encore plus beaux que sur les calottes habituelles. Quelquefois sur le devant, entre les branches du V central formé par les deux ailes du pan, deux petites - ramures » ont été brodées pour encadrer les initiales de la mariée.
Pour le «fond » de tulle à mailles rondes et à très fin réseau, les brodeuses à main se seront dépensées sans compter, réalisant des bouquets de fleurs, des motifs floraux les plus variés et les inévitables «plumetis ». La dentelle du « tour de tête » à la base de la calotte est également de tulle brodé de sept centimètres de haut et agrémenté de fines fleurettes.
Sur le pan toujours de tulle, même débauche de fleurs et de guirlandes brodées à la main. Des tuyaux, encore des tuyaux, longs de six à sept centimètres, sur toute la partie avant de la coiffe. Deux grandes ailes arrondies, de part et d'autres de la tête, donnent à ce capot un air majestueux. Pour le rehausser encore. Madame place sur le devant et au milieu de la coiffe, le plus joli « cabochon » en or, qu'elle aura pu trouver... et les épingles à tête de perle qui maintiennent un peu partout cet édifice de dentelles seront remplacées, en cet endroit bien en vue, par des épingles d'or. Sur l'arrière de la coiffe et en son milieu, est disposé un gros nœud de ruban, formant cocarde ou «rosette"
souvent double. Il est de moire blanche comme les deux longs pans qui tombent jusqu'à la taille. Mais... mais, ici, comme ailleurs, tout le monde n'est pas riche et pourtant l'envie reste bien grande de se marier avec une si jolie coiffe! Alors il est des commerçants qui sont là, tout exprès, pour louer ballons et autres accessoires nécessaires en ce jour de fête. Et souvent, le recours à ces moyens laisse un triste souvenir des' la journée du mariage. Pour peu que l'on ait la malchance de ne pas trouver un capot à son tour de tète, il va falloir supporter tout au long du jour, ses « pauvres oreilles » trop serrées et qui, bien vite, vous font très mal. Parfois les souliers blancs (blanchis à la peinture) loués eux aussi, sont trop petits pour des pieds habitués à marcher libres et nus ou dans des sabots où ils ont toute leur place. Et il faut marcher, marcher sur des chemins de terre, à peine empierrés, tenir toute la journée. « Bien heureuse encore si le soir — disait en confidence la vieille grand'mère revivant ses vingt ans— ce n'est pas un mari trop empressé (c'est bien plus imagé en patois!) qui tombe sur vous ». Quel triste souvenir alors que cette journée du mariage!
Revenons bien vite à nos coiffes et à notre * ballon ». Les brodeuses n'ont pas toujours travaillé à leur confection et, très souvent, le <* point d'esprit » est entré seul, avec la dentelle « Valenciennes » dans la composition de cette coiffe imposante.
Tous ces capots : câlines, colinettes, ballons, se portent couramment jusqu'à la guerre de 1870. Cependant maman ou belle maman, soucieuses de tradition, désirent parfois que la jeune épousée reprenne l'ancienne et si jolie coiffe. C'est pourquoi l'on trouve encore jusqu'en 1914 des photographies et des cartes postales représentant nos Oléronaises coiffées d'un " Ballon ».

BALLON LE BALLET


C'était avant tout une coiffe pour se protéger du soleil. Aujourd'hui pour être belle, il faut se brunir la peau, par tous les moyens. Autrefois pour être belle, il fallait avoir la peau blanche comme du lait.
« Couv' tu la goule, ma feuille, te vas t'été toute routie, te sas don pas que l'souleil, o manghe la piâ ». On « l'emboîte » par-dessus la calotte, ou sur la câline pour sortir, lorsqu'on va aux champs ou à la côte.
couple oléronnais

________Madeleine Morlon _coiffe Ballet

Il doit certainement son nom à sa forme qui peut rappeler l'auvent, sorte d'appentis auprès de la maison et dénommé « le ballet •> en Saintonge. C'est un vaste étui à peu près quadrangulaire de 40 à 60 cm de large et de 40 à 50 cm de haut, fait de plusieurs feuilles de carton mince ou de papier épais et dont celle du dessus a été cousue avec l'étoffe de * Nankin •> qui donne au « ballet » sa couleur maïs. Sur le devant et dans les deux coins supérieurs cette coiffe porte les même arcs de soleil que la câline, placée dessous et qu'elle recouvre. C'est un travail ardu, fait à la « poussette » et qui ne sera jamais touché de toute la vie de la coiffe, car celle-ci ne pourra pas être lavée. Un gros fil de laiton, caché et cousu avec le carton, tiendra ouvert et rigide, dans une courbe harmonieuse, tout le devant du ballet. Sur l'arrière un remarquable travail de couture a serré, en « plis d'orgue » (9) autour d'un laiton, toute l'étoffe, depuis la nuque jusqu'aux coins supérieurs, dans une envolée de rayons. De plus, pour bien protéger le cou des intempéries, le «nankin", doublé, se prolonge en triangle sur les épaules, formant couvre-nuque. Un ruban de faille noire, placé horizontalement fait le tour de la coiffe, environ aux deux tiers de la hauteur et borde la petite cape triangulaire. Parfois, deux "guides » de même ruban tombent gracieusement sur les côtés. Mais voilà qu'une nouvelle mode arri-
vait ; le modernisme apportait la simplification et les capots furent abandonnés. Les dentelles s'oublièrent, dans une vieille gazette du temps passé, au fond " d'in liroué, dans l'cabi-net " et les calottes furent fendues en deux... pour faire des « pùsouts « aux « drôles * (10). Ce fut l'époque des « bonnets »

Paulette  Gauriveau _ coiffe bonnet ruché LE

BONNET RUCHE


II ressemble beaucoup à la coiffette, mais il est beaucoup plus rigide, moins rond et plus emboîtant. Fait à la tète de la cliente, il englobe cette fois le chignon. Il est monté en plusieurs morceaux qui seront cousus et lavés séparément, lorsqu'il sera sali. On retrouve la même bande centrale du tulle brodé au milieu, les côtés (d'encore plusieurs pièces) mais tous les tuyautés sont remplacés par un bouillonné de crêpe de soie, large d'à peu près deux centimètres sur un centimètre de haut. Ce " ruche ", de fabrication industrielle, est un ensemble de fils de soie très finement entrelacés, brillants ou mats, les premiers étant bien mis en évidence.
A l'intérieur du bonnet un tulle noir gommé, employé comme armature, épouse entièrement la forme de la tète et emboîte la chevelure toute entière. 11 est plissé sur les côtés en 8 ou 10 gros plis qui apportent de la rigidité à l'ensemble. Ce tulle noir, simplement faufilé, sera extrait de même que le bouillonné et les ruches, au moment du lavage.
Malheur! malheur à l'étourdie que la pluie prendra en chemin, alors qu'elle aura oublié son parapluie. L'amidon et surtout la teinture noire ne tarderont pas longtemps à « dégouliner » et faire de la jolie coiffe un affreux épouvantai! !
Dans cette coiffe, les brides sont réduites à la plus simple expression. Deux longues bandes de mousseline de soie blanche, sans aucun décor, sans le moindre travail, larges de vingt-cinq à trente centimètres, tombent sur la poitrine jusqu'à la taille. Parfois, plus rarement, elles sont remplacées par des bandes de mousseline de colon, identiques en dimensions et agrémentées d'une ou plusieurs guirlandes au milieu.
Ces attaches sont croisées le plus souvent sur la poitrine, ou bien faisant office d'écharpe autour du cou. sont nouées sous le menton avec un simple nœud.
Il existe une «façon » grand deuil de la coiffette et du bonnet ruche. Pas de tulle ni de dentelle. Toute la calotte est de mousseline. Le seul décor permis est sur le panneau central. Il représente toujours un entrelacs de quelques lignes géométriques, réduites au minimum. Les tuyautés et ruches sont supprimés et remplacés par un bouillonné d'organdi « effrangé ». La blancheur immaculée de l'amidon, sur la sévère simplicité de ces entrelacs donnera pourtant à cette coiffe grande figure, sous la modestie qu'elle aura voulu garder.
Maintenant tout est fini! Les lingères ne trouvent plus de ruche de soie, les «faseuies de bonnets » s'en vont au cimetière. Personne ne sait encore faire des « couéffes » et « o y a pu qu' les veyies qui v'iant s'couéffer coum' d' aut' foué ». Pourtant les dernières vieilles ouvrières s'accordent et vont, quand même contenter leurs dernières vieilles clientes. Ensemble, elles vont retenir le temps qui s'enfuit, emportant avec lui tout ce qui leur reste de leur jeunesse et de leurs beaux souvenirs.
C'est pieusement que le groupe folklorique conserve la seule collection importante des dernières coiffes oleronaises et les pièces uniques faites à Dolus par les sœurs Paulin et au Château par madame Bonnet au nom prédestiné. La dernière en date de ces coiffes est un bonnet, de la même forme que ceux présentés avec des ruches, mais sans ceux-là, puisqu'il ne s'en fabrique plus. Sur sa carapace de tulle noir, une enveloppe en crêpe de soie blanche, parfois aussi de couleurs tendres,
est finement plissée à l'ongle en bandes parallèles. A l'emplacement des tuyautés, partout où il y a couture, une petite bande très étroite de la même mousseline de soie, est cousue en plis serrés. Celte coiffe ne sera pas amidonnée et ses attaches seront de
même tissu.
Traçons un trait sur ces bonnets si traditionnels pour passer à une coiffure tout aussi particulière, bien que moins typique de notre île, tout au moins si l'on ne considère que sa forme générale

Frédéeique Guériteau _ coiffe Benèze LA

BENÉZE


« et minfiez-vous !... thiellés qui zou z'écrivant. Minfiez-vous d'thieu l'accent, eurgardez beun' de quel coûté qui l'est dau minme bord que thieu de Goulebenéze ».
La benéze, il n'en reste qu'une, une seule dans toute l'île d'Oléron C'est une « couéffe «toute neuve que la mère Ragot, « d'au Château » a faite exprés pour nous. I1 y a bien longtemps qu'on ne la porte plus et rares sont les Oleronnaises à l'avoir connue. Les dernières étaient noires. Elles appartenaient à des femmes âgées ou en deuil. Mais, bien sûr, il s'en faisait aussi en blanc.
La benéze est une coiffe du dimanche qui ressemble dans sa forme au Quich’Not , mais elle est plus grande dans ses dimensions tout en respectant le volume de la tête. Venant davantage sur le front, elle descend plus bas sur le cou. Le volant qui sert de cape garnit davantage les épaules. Ici, pas de carton mais une armature de fils de laiton. Six fils de laiton « habillés » de coton blanc encadrent la tête d'une épaule à l'autre dans un demi-cercle parfait. Douze autres fils de laiton remplacent les douze cartons de notre Quich’Not dans le sens transversal, croisant les précédents. Et ce cadre métallique qui pourrait faire
impression, lié de fil blanc, disparaît sous une mousseline blanche ornée de motifs floraux ou die plumetis. Une . doublure de mousseline unie placée à l'intérieur, protège la coiffe. Et on aura recherché la plus jolie Valenciennes, pour donner à cette coiffe un air de fête, en la recouvrant d'une débauche de bouillonnes de dentelles. Cousu sur une bande de fine mousseline plissée, un ruche de plusieurs centaines d'alvéoles orne toutes les nervures de notre benéze, sur le front, sur le fond, sur les côtés, sur les bords de la cape : une vraie cascade de dentelle.
Sous le menton deux jolies brides sont nouées en une rosette fleurie, donnant au visage ainsi encadré une douce auréole ombrant à souhait le teint chaud et coloré de la jeunesse. Comme beaucoup de coiffes (et pas seulement chez les Oleronaises ) la nu-
Qu’est la partie la plus décorée. Ici, ce sera par un nœud et un nœud fait une fois pour toutes. Comme pour l'ensemble de la coiffe, aucun nettoyage ne sera possible sans démonter et découdre tout l'édifice. On ne saurait donc, dans ces conditions, porter la benéze en toutes occasions. C'est blanc et ainsi bien sa-lisant. Il faudra prendre garde à la poussière, à la transpiration, ne pas y mettre les mains, ne pas se cogner et en la retirant, ne pas la coucher encore moins l'aplatir. Elle sera posée avec soin sur la « marotte » (13) (le mieux serait le « globe » (14)). Les ruches et ce joli nœud de ruban garni de dentelle dont nous parlions à l'instant ne supporteraient pas d'être aplatis. Alors, lorsqu'elle ne sera pas portée, la benéze restera au « pendail » (15).

CONCLUSION

Cet exposé, que nous pensons exhaustif de toutes les coiffes portées couramment dans l'île ne nous mettra pas à l'abri de nouvelles découvertes. Nos recherches ne nous ont pas permis, avec les éléments disparates qui nous ont été présentés, d'en déduire éventuellement des formes encore inconnues. Pourtant il se trouvera bien quelqu'un pour remarquer « ...et la Grand Couéffe ». C'est vrai! il y a la « Grand Couéffe ». Mais on ne la connaît que de nom. Cette cape, qui nous vient en ligne droite, ou presque, du « bardocucculus » (16) n'est que la pèlerine et le capuchon que nous connaissons tous.
Pourtant cet ensemble reste très particulier. Ecartons la pèlerine en drap amazone qui ne nous intéresse pas, il reste le gigantesque capuchon. De drap de laine, lui aussi, il est doublé intérieurement de « mérinos » (17) de la même couleur.
Cette doublure est maintenue sur le fond par une multitude de petits bouillonnes qui apportent un décor seyant à ce capuchon tombant largement sur le dos, qui revient sur chacune des épaules et se ferme sur la poitrine-
par deux boucles de vieil argent, celle de droite s'accrochant sur l'autre. La « serpentine » (18) ou le velours, noirs, en simple ou double rang finisse d'enjoliver notre Grand Couéffe, mais ce capuchon est cousu à sa pèlerine et se sera donc jamais une coiffe. Il n'est là que pour décoration. Comment penser que ce lourd ensemble puisse un jour, même par mauvais temps, s'appuyer sur une de ces jolies coiffes, amidonnées ou non, qui faisaient et font encore l'orgueil des traditionnalistes de notre île.
« Asset '... O lé finit ' ». Ces quelques lignes nous ont permis de nous « laisser aller ». Et c'est avec regret que nous cesserons de vous conter la petite histoire des compagnes de nos anciens et de nos compagnes (pour les plus âgés d'entre nous) celles qui ont avec nous gratté la terre, monté le « sart » (19), tiré le sel ou couru les grèves.
Pour cela, nous nous efforcerons toujours de rappeler le souvenir de leurs coutumes auprès des générations qui montent, par la maintenance des traditions locales.

NOTES

(1 ) Littéralement : je suis « en cheveux.
(2) Sorte de filet très fin pour tenir la coiffure.
(3) Manière de froncer en poussant le tissu au doigt sur l'aiguille.
(4) Ouvrière spécialisée dans le repassage des pièces amidonnées.
(5) Arçon : par analogie au sarment de vigne que l'on courbe en cercle pour lui faire produire plus de fruits.
(6) Point qui se monte sur 5 fils de long et 5 de traverse en laissant à chaque fois 2 fils en croix, les 5 fils étant embrassés par un point noué.
(7) Prestance : élégance ; allure.
(8) La carrure, la taille... le gabarit !
(9) Petits plis très fins et cousus très rapprochés à la base.
(10) Couches absorbantes pour nourrissons.
(12) II y avait trois mouchoirs : le mouchoir de tête, le mouchoir de cou qui drapait les épaules et le mouchoir de poche, signe de richesse que l'on faisait voir le dimanche en le portant à la main, plié, ou en le laissant ostensiblement sortir de la poche. On le rangeait vite le soir en rentrant à la maison, car pendant la semaine, une guenille propre en faisait alors office.
(13) Marotte : tête de femmes en bois ou en
carton dont se servent les modistes ou les coiffeuses.
(14) Globe : enveloppe sphéroïdale de verre qui protégeait traditionnellement la couronne de la mariée.
(15) Pendail : supporta pied.
(16) Bardocucculus ou cucculus : mot latin signifiant capuchon et même vêtement qui couvrait la tête et le corps. Il était en étoffe grossière et est encore aujourd'hui porté par des membres de certains ordres religieux. Ce bardocucculus, originaire d'Europe centrale, adopté par les Romains pour les esclaves, le fut ensuite par certains Gaulois, notamment les artisans et les gens qui travaillaient à l'extérieur. C'était alors une cape, surmontée d'un bonnet dont nos ancêtres gaulois des tribus santons se recouvraient la tête et les épaules. La « cucule » pointue à l'état neuf était coupée au fur et à mesure de l'usage et de son usure ; elle devenait le « caloron » qui a donné son nom à notre champignon des marais salants : le « groupié » ou « chaloron ». La Médiolanum des Sentons (notre ville de Saintes actuelle) avait la spécialité de la fabrication descucules.
(17) Mérinos : tissu d'une texture spéciale, lisse et chaîne étant de seule laine de mouton mérinos, formant un drap léger et ne se feutrant pas.
(18) Serpentine : étroite guipure dont les bords forment des sinuosités arrondies en forme de dents.
(19) Sort : varech utilisé en fumure.

Quelques costumes :

Deux jeunes filles en coiffette et une en colinette lors d'un mariage en 2003

Quelques coiffes

de "Déjhouquées"

aux MIMOSA 2007

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